SLACK LINE

Connaissez-vous cette pratique sportive, qui s’apparente au
funambulisme, et qui consiste à marcher en équilibre sur une sangle textile
large de deux à trois centimètres, tendue dans le vide entre deux points
d’accroche fixes ?

Entendons-nous bien : ce que j’appelle vide peut tout
aussi bien être un espace de 30 cm de haut entre la sangle et l’herbe d’un
jardin, comme un dénivelé de plusieurs centaines de mètres si la sangle est
tendue entre deux pics rocheux en montagne. En effet, la slack line est une
pratique née dans les milieux proches de l’escalade, comme entraînement pour
appréhender l’instabilité et le vide.

Mais nous nous intéresserons ici à sa version plus ludique
et accessible : celle d’une sangle d’exercice tendue entre deux arbres,
entre deux poteaux, dans un parc ou dans un jardin privé. Et je vous encourage vivement
à découvrir et à essayer vous-même cette discipline, accessible vraiment à tous
car plus ludique que véritablement dangereuse.

Je voudrais vous parler aujourd’hui de tous les aspects
métaphoriques qu’on peut trouver à cette discipline.

Imaginez que vous ayez fait l’acquisition d’une telle
sangle, et que vous entrepreniez de l’installer entre deux arbres. Quelle va
être la tension souhaitable, la tension idéale pour assurer le confort du
marcheur, du slack-liner ? Si la sangle est trop tendue, elle ne pourra
absorber les à-coups de la marche, les hésitations, et les micro-pertes
d’équilibre, et éjectera le marcheur au premier vacillement. Si au contraire
elle est installée avec un jeu très lâche entre les deux supports, elle ne
soutiendra pas correctement l’effort, donnera trop de mou à chaque pas, et
demandera au marcheur un rétablissement périlleux à chaque avancée. Vous
visualisez les deux scénarios ?...

Qu’est ce que je suis en train de vous dire ?

Que face aux difficultés que nous rencontrons sur notre
chemin, beaucoup d’entre nous réagissent de façon excessive, soit par un excès
de rigueur vis à vis d’eux-mêmes (une sangle trop tendue) soit par un excès de
mollesse et de complaisance (sangle pas assez tendue). On retrouve d’ailleurs cette
image sous une forme poétique dans les écrits des maîtres du Bouddhisme Zen,
qui évoquent les cordes du shamisen (instrument
de musique traditionnel japonais, sorte du luth à long manche), qui ne peuvent
jouer une mélodie juste si elles sont trop tendues, ou au contraire pas
suffisamment.

Nous savons tous au fond de nous-même vers quels excès de
rigueur ou de complaisance nous pousse notre pente « naturelle ». Mais
qui dit pente naturelle ne veut pas dire attitude à jamais incorrigible. Ne
serait-ce pas le moment d’infléchir cette tendance, avec  patience, bienveillance, mais fermeté à notre
égard ?... Oui, la plupart du temps, nous exigeons trop de nous-même, ou
pas assez, et cela revient au même : nous mettre en position d’échec ou de
difficulté dans nos projets, alors que les conditions de la réussite sont là.
Alors… Lâchez-vous les baskets, ou secouez-vous… à vous de voir !

Continuons à observer notre slack-liner en progression. Il a les bras étendus de chaque côté du corps, à la recherche d’un équilibre qui se trouve compromis à chaque pas. Et que fait-il pour maintenir ses bras écartés et continuer à progresser ? Il ouvre largement sa cage thoracique, et… respire. Là est la clef de son équilibre, de sa progression. Une respiration ample et libre. Combien de fois, dans de nombreuses circonstances, sommes-nous en apnée dans notre vie, au propre comme au figuré ? Il nous faut absolument repérer et traquer de tels moments, pour corriger immédiatement cette contraction involontaire et … respirer. Ne dit-on pas « avoir de l’inspiration, être inspiré » ?  Pensez, dans la journée, à faire quelques grandes inspirations et expirations, comme ça, juste pour le plaisir, juste pour retrouver votre équilibre. Et redressez vous, pensez à votre slack line : on n’a jamais vu un slack-liner bossu !!!

Voyez si dans un parc public autour de chez vous il y aurait
une slack line installée, où vous pourriez vous exercer à marcher en équilibre,
en pensant à tous les enseignements de vie que cette simple sangle peut vous
apporter.

Joyeux hiver à tous !

Marianne Roze